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demi-réticule, et paraissait à première vue peu attirante.

Mais causait-on avec Mlle  Beuque, prenait-on contact avec la minuscule personne, dont il ne restait presque plus rien, tant elle s’était dépensée, épuisée pour sa cause, on s’attachait à elle et l’on n’avait bientôt plus qu’un mot pour peindre cette créature d’élite, dont l’apparence était celle d’une vilaine petite personne : « Elle est adorable ! » Les phalanstériens l’aimaient de tout leur cœur. La bonté, l’enthousiasme, la foi, le perpétuel sacrifice d’elle-même aux idées de Fourier, donnaient à sa physionomie un caractère, à ses yeux une flamme, à son sourire un contentement de conscience, qui ne peuvent se décrire ; après tant d’années, je ne les ai pas oubliés.

Lorsque le docteur de Bonnard me conduisit à la librairie phalanstérienne, j’en revins à tout jamais l’amie de la chère petite vieille Beuque. Nul ne parlait de Fourier comme elle, nul ne voyait la réalisation du fouriérisme aussi proche. Ah ! comme on était loin alors d’un temps où l’on exalte les Apaches ! Tout ce qu’il y avait de noble, de généreux, de sociable dans l’homme était sollicité. L’évolution commençait à se faire dans le sens des idées de Fourier. On voyait poindre partout des tentatives de coopération. La maison Leclère, association d’ouvriers selon les principes de la coopération phalanstérienne, distribuait des bénéfices à ses