Page:Adam - Mes premières armes littéraires et politiques.djvu/150

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

s’improviser journaliste et fonder avec succès la Démocratie Pacifique, ne trouva en lui ni les facultés d’un organisateur ni celles d’un législateur. C’était un apôtre et rien de plus, mais irrésistible, hélas ! On vint à lui de tous les coins de l’univers, et l’affluence fut si grande au Texas que très vite les ressources manquèrent et que le désordre matériel et moral devint tel qu’il fit sombrer misérablement la Réunion.

À Paris, le siège central de « l’École phalanstérienne » était sa librairie, rue de Beaune, dirigée par une vieille fille, Mlle  Aimée Beuque, qui, ayant connu Fourier à Lyon, avait été l’une de ses premières disciples, alors que, simple courtier de commerce, il vivait dans le milieu le moins favorable à ses idées.

Mlle  Beuque amena au fouriérisme l’un de ses amis intimes, le capitaine du génie Gauthier, qui convertit lui-même un grand nombre d’officiers de son arme à la doctrine phalanstérienne.

Mlle  Beuque était l’âme de la librairie de « l’École », une très grande âme superbement idéaliste, passionnée d’harmonie sociale dans un pauvre petit corps chétif et laid. La « tante Beuque », comme on l’appelait, son énorme tache de vin sur la figure, vêtue d’une robe de laine noire grossière, d’un chapeau cabriolet à larges brides, noir aussi, qu’elle ne quittait guère, ne sortait jamais sans un sac demi-cabas,