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4 384 · LE SERPENT NOIBQ } V de renouer la conversation essentielle, soit avec · Mm Goulven, soit avec son mari, soit méme avec leur "cousine. Tous se déroberent. Ils connaissaient — trop mes tactiques. Leur- pudeur ne se souciait plus de m’etaler des faiblesses que je savais sufiisammentc ·· Dans le port d’Auray, notre bateau avait du, malgré nos prières, et par effet d’un contrat préfectoral, .· embarquer des moissonneurs à destination de Belle— Isle, avec une cargaison de bois. Ivres, ces nombreux passagers, assis sur les fagots, _sur les troncs de hêtres, de bouleaux et de sapins, chantaient et se ta- ` quinaient, à l’aise. En leurs costumes qu’eut peints -' Watteau, de jolis Gilles et d’aimables·Zerbinettes se ' lutinaient. Un joueur de cornemuse, juché sur la · dunette d’avant, s’époumonnait, en rythmant du sabot, [la ritournelle. Aux cordages tendus dans l’air vers la pointe du mât, des mains s’agrafaient que les travaux de la terre avaient grossies et durcies. Contre les bor- dages s’adossaient les vestes blanches de Pontivy, les vestes bleues de Locronan, les guimpes en percale des Lorientaises, les longs châles marrons en honneur ’ dans,les îles du Morbihan, les corsages noirs à courbes de velours ceignaut les poitrines épaisses du Finis- .tère. Des figures fraîches, virginales et rondes ` riaient sous les tiares d’ou pendaient les courtes ._ pèlerines noires doublées de vert, doublées d’ama·· rante, doublées de cramoisi, reflets variables pour · _ les joues a fossettes et les cous hâlés. Des fileuses s plantaient a leur hanche la quenouille chargée de lin roui.‘Avec leurs doigts alertes, elles roulaient le ül · sans négliger de riposter aux agaceries des gars, qui se `frappaieut l’épaule et laissaient le rire tordre leurs tailles. _· `