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LE ssnrmr Nom _ ‘ 365: lorsque notre groupe s’y arrêta. Les vieilles maisons aux murs couverts d’ardoises, aux étages en saillie su1· leursrangs de solives, aux pignons aigus, aux panses lourdes, aux petites boutiques basses et allais- sées dans le sol, excitèrent l’enthousiasme verbal de ces dames La Revelliere, tandis que M""' Goulven, comme pour s’étourdir, leur disait l'histoire de l’en- droit, et des anecdotes. Elle leur montrait les deux flèches de Saint-Corentin dressées dans le ciel, au bout de la rue. Elle contait les légendes pieuses. Une volu- bilité singulière l’anima. Bientôt elle nous entraînait sur le pont du Steïr. Elle nous fit admirer la tourelle en échauguette suspendue au coin de là masure que baigne ce ruisseau transparent, puis toute une pers- pective de maisonnettes trapues, gibbeuses, plantées de guingois et à pic sur les deux rives de cette eau ` tortueuse. Aux lucarnes se montraient des femmes en hennins. Et M"‘° Goulven dissertait, tendait les · bras, indiquait chaque chose avec son doigt ganté de coton. Fille respectueuse de cette terre et de ces débris, elle interrompait les évocations prétentieuses de ma- dame Hélène pour y substituer les siennes, pourvues d'histoire locale et de renseignements exacts. De fait, · elle voulut, a tout prix, fuir la discussion. Elle se _. réfugiait dans l’amour de cette ville, survivance de traditions périmées, de vies jadis intenses. Chacune de ces pierres ébréchées, chacune de ces poutres grossièrement apparentes, chacune de ces tourelles, chacune de ces devises inscrites aux frontons des _ magasins, la défendaient contre la clairvoyance de _mon esprit positif. Mm Goulven interposait leur gloire entre nous. L’enfant peureuse se cache derrière les jupes de sa mère, à la venue de Pétranger.