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LE sEm·i;1vr`No1u 165 i vrir, dans le vague, quelque image irréelle, mais triomphale. Une légère fatigue amollissait plus ses gestes nonchalants et voluptueux. Elle s'adossait au coussin du fauteuil. Sa main éleva le cristal d’un verre tout embu. Ses jambes longues se croisèrent un peu virilement. Celane révélait-ilpas que son être assumait, a cette minute, une détermination courageuse ? Sous . la jupe, la bottine blanche se balança; les aiguillettes du ruban luisaient, puis s’éteignaient. Le charme extrême de cette attitude était plus sen- sible encore par l'0pposition que fournissait M“‘° Goul- i ven, si terne dans sa robe plate, dans ses escarpins `de toile, dans sablouse de coton. Bien que fins, les doigts hâlês de notre hôtesse firent paraitre plus étin- celantes les mains nacrées de madame Hélène, quand elles tripotèrent ensemble le vieil argent bossu de la théière, du sucrier, du pot a lait, quand elles rem- plirent les faïences bariolées de nos tasses. Tout en rivalisant de théories sur les gourman- dises diverses, - la flamande, la bretonne, la pari- sienne et la tourangelle, fort connue de Mm La Revel- liëre, - nous applaudissions secrètement a cette di- vinité radieuse de la jeune veuve. Ce fut a regret que le docteur dut sortir pour consoler une petite diphtérique dans un hameau sis a plusieurs kilomè- tres de Sauzon. Nous vîmes le vol de sa bicyclette tourner le coin de la rue encombrée par les pêcheurs _ · badauds, qui s’ennuyaient d’être inactifs, ce diman- che, dans leurs costumes neufs et bleus, autour du phare trapu, Bientôt MM La Revellière et M¤=° Goulven i consentirent a faire le domino de Gilberte qui l’exi- geait. Au bord de la terrasse, nous nous installàmes, la belle veuve et moi.