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146 LE sauveur nom y point que la splendeur du paysage grandissait étran- gement depuis que je les regardais se rire dans cette aube.Leur attitude me parut semblable à un emblème de religion. Je pensai vaguement que rien ne se mue- rait plus du soleil, ni de l’0céan, ni dexl`éther, ni de leur geste, assemblés par le génie des Causes, alin de créer ce mirage imprévu. N’était-ce pas leur attrait mutuel et fatal que la nature divulguait ainsi en les situant parmi ces prestiges inoubliables? Le destin, à ce que je conclus, m’avertissait que ces deux per- sonnes allaient se chérir. ‘Je n’avais que faire dans leur aventure. Mordue par le dépit, toute ma chair se 4 révolta. Mes espérances devinrent agressives. A parler raisonnablement, l’illusion ne dura point. Presque aussitôt, ces personnages me furent une gra- cieuse dameenveloppée dans un peignoir de soie V souple, un monsieur tout simple dans son pauvre veston, et qui,l’une avecl’autre , s’amusaient à l`éch ange de phrases trop pompeuses. D’aillenrs le ciel s’azurait ' platement. Le soleil perdait son 1`ard d’incendie. La mer se reposait d’avoir été rare, en adoptant ses tons gris et glauques les plus quotidiens. Je n’en demeurai pas moins sur de ma déconvenue. C’était_ le rival, cet homme appuyé contre le mur bas qui limitait la ter- rasse et le maigre jardin dc cactus rébarbatifs, de tamarins atrophiés, de sveltes lis héraldiques, cet homme qui se caressait les joues en écoutant les beaux discours de madame Helene. Rien d’autre, pourtant, ne dénonçait qu,’il y eut, entre eux, du mystere. Tous les jours, a cette heure précise, le docteur traversait ainsi la terrasse de Keryannic pour s’enfoncer dans- le laboratoire de l‘ancienne buanderie. Sa peau brune et fauve n’était