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LE sanrsxr Nom 105 dans les ajoncs; elle plaquait une lueur rousse sur les frissons de la mer étreinte par les caps de l`anse abrupte et broussailleuse. Les Sardinieres, s’étant levées, clefripèrent leurs tabliers de couleur, rajustèrent leurs chi gnons dans la guipure de leurs étroits bonnets, et offrirent leurs mains pataudes aux mains gonflées des pêcheurs. Une farandole se forma, puis une ronde. Deux chœurs, l‘un de voix féminines et jeunes, l’autre de voix graves et mâles, se répondirent, répétant, a plusieurs reprises, chaque distique `d’une complainte. Au son des paroles, la chaine des bras se balançaiten mesure. Un flux de pas menait la ronde vers la gauche; un reflux de pas la ramenait vers la droite. On eût dit que le mouvement des eaux animait lui—même tous ces membres passifs. Son rythme, certes, guidait le ton de la mélopée triste et lente, fougueuse parfois : telle la course d'une vague lourde qui va s’écrouler dans ·la mer uniforme. Le murmure voisin de l`0céan était la musique de cet étrange bal. Dans l’ombre argentée, les apparences diverses des êtres se confon— p dirent, même les couleurs des tabliers. Le bruit cla- quant des sabots scandait, d’un même son, la joie sage des sauteurs. Les gars piétinaient le sol, et les ülles secouaient leurs jupons sur leurs larges hanches, selon les. plaintes de la chanson qui racontait le malheur de la fiancée, la tin de son matelot dans l’ab1me : Pleurez, pleurez, la belle : Les poissons l’ont mangé! Pleureg, pleurez, la belle : Les poissons Pont mangé!...