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, LE SERPENT Nom 103 — Goulven, et en y joignant les résultats d’investigations faites ai Paris, me pria tout d’abord de ne consentir nulle avance, sauf instructions spéciales. Par malheur, . l'opinion du monde médical était alors peu favorable J a mon ami. Les renseignements recueillis par l’agence de notre Société ne différaient pas sensiblement de ceux que je reçus à titre particulier. Goulven n`attire pas les sympathies, encore moins les amitiés. On peut l’admirer, le respecter, le plaindre; on n’est pas tenté de lui rendre service puisqu’on le sait incapable d’en rendre à son tour. Orgueilleux, il se refuse à · toute démarche. Il voudrait ne rien devoir qu’à son talent. Il voudrait que le monde fonctionnât selon les règles de l’abnégation chrétienne et du stoïcisme romain.·Et, comme le monde néglige de se conformer · à ces disciplines, il hausse les épaules, se détourne ` des hommes sans leur nuire, ni les trahir, ni même- les mépriser, mais en les oubliant. Seuls les auteurs de livres scientiliques, et les malades sur lesquels il étudie les effets de sa thérapeutique,_ lui semblent mériter qu`il garde la mémoire de leurs noms. Il ne se connaît pas de ces amis décidés ànous secourir parce qu’ils sont, avant tout, les complices de nos passions, et parce que nos vices ambitieux justifient le succès des leurs. u ' Quand j'interrogeais Goulven sur tel et tel de nos anciens camarades, sur ses collègues de la marine, il fouillait en vain dans ses souvenirs, ou me commu- niquait les avis de l’annuaire. Après vingt—quatre heures de séjour chez lui, je ne flairais même plus ses vagues répugnances trop évidentes lors de notre rencontre à Sainte-Anne-d’Auray. Il me subissait comme l’ardeur trop intense du soleil, ou la fraîcheur