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Elle voyait dans la fièvre se tracer en images tangibles les souvenirs de guerre contés par les adjudants. On dut écarter d’elle tout l’appareil militaire ; les uniformes, les armes, les gravures signalant la bravoure historique. Le son lointain du tambour suffisait pour l’évocation sanglante ; et c’était une chose horrible. Elle se dressait menue, hagarde, les mains ouvertes et tendues pour repousser la hideur du rêve… « Oh ! disait-elle, que de pauvres vies tranchées… Le fleuve de sang saute les digues… Les têtes roulent comme des boules… Les doigts se crispent sur le sabre qui les coupe… Oh ! les yeux des mourants… les yeux ! les yeux ! les yeux !… Le sang monte, monte… Il est à ma bouche… pouah !… il m’étrangle… je ne veux pas… » Et elle retombait dans des crises…