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Majestueusement elle fut la dispensatrice des baisers conciliateurs et des caresses de privilège. Son orgueil d’être indécis et virtuel, capable de toutes merveilles, principe et réceptacle des passions, but des prières tremblantes ; son orgueil légitime de sanctuaire inviolé jusqu’au jour du triomphateur librement choisi et consacré par les religions, lui donnèrent toute force, toute royauté, toute puissance. Sous le dais conjugal elle marcha première, hiératique et sainte, daignant des soirs se révéler en complaisances et en douceurs, et livrer le baume de sa chair pour panacée aux fièvres de l’amoureux capitaine.

Et il ne se voulut reprendre. Par suprême courtoisie il approuva tous les désirs, et s’humilia aux plus dévouées adorations.

Galamment il prétendit que ce lui était délices qu’on le commandât, et si, parfois, il se laissait rire de la haute gravité de l’officiante, il voulait aussitôt qu’on le punît d’une moue perfide, où la rose plaie de la bouche se plissait et se retirait à ses lèvres quémandeuses, où les yeux pleins d’astuce menaçaient de sûres vengeances sa félonie.

Tant parut lui plaire l’initiation qu’il ne se voulait résoudre au retour. Seul un ordre impérieux des ministères le put décider à rejoindre la demeure ornée par les mains maternelles dans la place d’état-major.


VI


Ce premier soir de logis stable et définitif s’ouvre le gala de bienvenue dans l’intimité du temple nuptial. Les lampes arrosent de lumière le soyeux boudoir où se pavanent