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volontaires et physiques pour assurer à notre génie la prédominance de l’industrie scientifique. De quelles émotions étaient suivis ces hommes et leurs véhicules tumultueux quand ils passaient, sur les Renault rouges, les Panhard bleues, forces terribles et sonnantes, apparues comme des points d’ombre à l’horizon, grossies comme des bêtes furieuses, disparues sous leurs carapaces, que signalent, durant trois ou quatre secondes encore, les vestes que l’air gonfle, les foulards qu’il secoue sur les nuques, les manches qu’il boursoufle autour de ces corps contractés !

Comme s’il eût été nécessaire de prêter à ces vaillances le prestige évident du péril, le malheureux Teste fut retrouvé, ce jour-là, sous sa Panhard, après un capotage, en piteux état. On sut que le choc avait enfoncé une côte, brisé le fémur d’une jambe, rompu l’os d’un bras. On rappelait que, la veille, un chauffeur, ayant laissé du goudron fondre à la chaleur de son front, sentit l’âcre liquide lui brûler atrocement les yeux. Si impérieuse avait été sa douleur qu’il voulut d’abord sauter hors de la voiture. À grand’peine, lors de l’arrêt, on insensibilisa l’organe blessé en injectant de la cocaïne. Fou de souffrance, il trépignait, il criait. Néanmoins, parce que les règlements eussent forcé à retirer la voiture de la course s’il abandonnait la place, il eut l’énergie de remonter et d’accomplir le tour du circuit. Pendant la centaine de kilomètres il peina, presque aveugle, ballotté par les chaos de cet élan formidable. À la fin il lui fallut pourtant renoncer. Quel courage d’excellent ouvrier, négligeant sa torture pour tenter de mettre en triomphe l’œuvre entreprise ! On montrait Jenatzy qui dut abandonner sa