chanter les vers de Marinetti, s’intéresser aux élégances de New-York et à la musique de Norvège. Dans les magasins, les vendeurs déplient les plus belles soies sous les yeux des femmes brunes et souples, couronnées de fleurs en toquets. La science, l’art et le commerce règnent.
De Milan au lac de Corne, la route est brève. Elle atteint le pays féerique aux montagnes de nacre irisée, reflétée dans le pur miroir des eaux, tantôt lapis, tantôt émeraude. De Bellagio on aperçoit les fonds et les perspectives que le Vinci perpétua dans ses œuvres. Les Alpes bleues et vertes s’entremêlent, immuables, et valent, par leur magnifique immobilité, le sens de la meilleure quiétude au contemplateur. Il se croit le chevalier ou le mage des légendes mélodieuses. Il comprend là comment et pourquoi vécurent, dans le cerveau des poètes, des musiciens, Mélusine, Penaud et Armide, Lohengrin. Ce décor doit engendrer nécessairement les héros, les magiciens et les fées. À quoi serviraient ces lignes et ces nuances s’il ne naissait, là, un type de beauté vivante ?
Peschiera, sur le lac de Garde, offre en automne les grappes monstrueuses d’un délicieux raisin. Nu-pieds, la jupe et la blouse collées sur leurs formes rudes, les paysannes tendent au passant ces fruits comme taillés dans les transparences de l’aventurine.
À Rome, on salue les traces superposées de tous les âges admirables. La chaussure du légionnaire et la griffe de la louve fixèrent leur empreinte dans les boues pétrifiées du Forum. Les ongles de Caligula furieux laissèrent des