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les arts et la force

volontiers le duo de l’opérette, puis l’ouverture d’un opéra, enfin les thèmes du drame lyrique. Les voilà dilettantes et soucieux de déchiffrer les partitions de Wagner, parce qu’ils ont fredonné tout un mois, jadis, les Blés d’Or. Celui-ci, que captiva le feuilleton du journal, s’intéresse tout à coup aux romans de Flaubert, de Balzac, aux poèmes de Vigny, aux œuvres de Villiers de l’Isle-Adam et de Laforgue. Alors les philosophies mystérieuses l’attirent. Du goût plastique à la science des couleurs, à la chimie, à la physique, le chemin est direct. Quiconque étudie l’harmonie s’oblige à connaître la théorie des ondes sonores, des vibrations, du mouvement biologique. L’amateur de lectures ne satisfera toute son envie de vivre les mille et les mille existences narrées dans les romans que s’il effleure l’ethnographie, la psychologie des individus, puis des peuples, leurs religions, leurs métaphysiques, leurs lois.

Or rien n’initie aux arts comme le voyage. Lorsque le cycle ou l’auto nous emportent à travers les monts et les plaines, malgré nous, les aspects du paysage s’imposent. Ils émeuvent. Tout de suite nous comparons aux gravures et aux tableaux les campagnes que le soleil accable, que la pluie nuance, que les nuages endeuillent. Aux arrêts dans les villes de province, par les chaleurs, il n’est pas d’endroit plus frais que les vieilles églises, les châteaux anciens, les demeures archéologiques. Si l’orage ou la pluie nous confinent quelques heures à l’auberge, il faut bien lire le volume écrit par un magistrat en retraite ou l’archiviste sur l’histoire de la cité, à moins que ce ne soit le roman dont l’action se passe dans le décor de la province. Il ne faut même pas un effort pour s’intéresser