damnés à devenir la proie de barbares ignorants, frugaux, cruels, musclés.
L’exemple actuel nous indique l’erreur d’une pareille thèse. Ce que les Japonais acquirent jadis d’adresse pour obtenir le sens esthétique, les servit parfaitement pour s’assimiler en trente ans, les problèmes de la mécanique, du génie militaire, de l’intendance, et leurs solutions. Contre les Russes, qui possèdent seulement certaines survivances de l’orfèvrerie byzantine et une littérature toute récente, ces vieux travailleurs d’ivoire, ces horticulteurs de plantes naines, ces dessinateurs au pinceau, ces traditionnels doreurs de laque dépensèrent soudain une vigueur militaire et une ardeur scientifique incomparables. Après avoir berné la diplomatie de leur adversaire et rendu manifeste l’infériorité par ignorance des officiers moscovites, ils les battent grâce aux astuces de leurs talents scrupuleux.
En effet, dans la pratique des arts, l’intelligence des ancêtres s’était infiniment exercée, accrue. Avec leur sang, les pères communiquaient à leur progéniture la possibilité de leurs vertus mentales qu’ils développaient par l’éducation du goût. Éveillé devant le spectacle d’objets exquis, d’images subtiles et harmonieuses, l’esprit des enfants apprenait vite à contempler la nature avec des yeux perspicaces, De bonne heure, il prenait coutume d’observer, de découvrir, de comparer, d’imiter. Ingénieux, l’écolier promptement s’amusait au jeu de faire l’artiste. On ne peut feuilleter les albums de gravures japonaises représentant la vie des simples, celle des rues, des intérieurs, sans remarquer le narquois, le sagace et le railleur des physionomies dessinées. Quelques lignes aux