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la morale des sports

s’avilir, ni de corrompre. Sortis de ce lieu, ils s’étonnent de leur faiblesse et de leur sottise.

Certes, les gazettes spéciales de la politique contiennent rarement les témoignages d’une mentalité supérieure ; pourtant les articles y sont déduits assez proprement, et les paragraphes écrits selon la syntaxe commune. Que les signataires de ces lignes imprimées montent à la tribune de la Chambre, ils ne profèrent plus que des incohérences. Le langage pervertit ce qu’on avait pensé doctement, la plume à la main. Rien de piteux comme le discours d’un député : les contradictions, les amphibologies, les fautes de grammaire, les prosopopées ridicules, les périodes à la Joseph Prudhomme, les preuves d’une ignorance universelle abondent. En sorte que les seuls discours supportables semblent ceux écrits d’avance, et appris par cœur. La parole précieuse naît du silence. Si tant de badauds aiment se rendre aux réunions publiques, c’est que, gratuitement, ou presque, ils s’amusent du pitre grimaçant, se démenant et tonnant sur l’estrade. L’éloquence ne les attire point, mais la gesticulation du grotesque, et aussi le besoin de crier, d’applaudir, de conspuer, de haïr avec tumulte.

Surprenez, au coin de la rue, la conversation de deux cuisinières. Elles ne s’enseignent rien qu’elles ne sachent déjà. Elles se bornent à constater des vérités quotidiennes, relatives aux qualités du hareng, du turbot, de la sole. Cependant, la conversation se perpétue. La température même nantit de sujets cet insipide caquetage. On finit par observer qu’elles prêtent peu d’attention à ce que leurs bouches murmurent nonchalamment. Elles parlent pour entendre des sons quelconques sortir de leurs gorges et les assurer ainsi de leur existence. « Je bavarde, donc