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les sensibles et les volontaires

point si quelqu’un échoue dans sa tentative. L’Anglo-Saxon respecte l’effort malheureux inutile. Nous ne respectons que l’effort heureux. Il s’estime solidaire de quiconque agit, mène sans adresse. Nous nous jetons dans le camp adversaire de celui qui choppe et s’embourbe, pour le décrier. Notre orgueil se flatte du désagrément qui lèse la vanité voisine : c’est un rival de moins. L’orgueil d’un Anglais déplore qu’un être de sa race, éduqué comme lui, selon les mêmes méthodes britanniques, ne mène pas à bien son affaire. Il sait rendre hommage à l’initiative du prochain. En cela, l’Anglais est plus solidaire que le Latin.

Il révère le principe de l’action pour l’action, comme certaines écoles françaises révèrent le principe de l’art pour l’art. Et ce sont là des contraires. L’Anglais n’érige pas en vertu le désintéressement. L’acte doit finir par avoir sa sanction : un gain positif, indiscutable, net. Le chasseur bourgeois du Lancashire ou du Kentucky veut surtout saisir sa proie. Le nôtre tient à ce qu’on vante son adresse ou qu’on approuve son costume : idéologie, esthétique. Pour la plupart des rameurs de la Tamise, leur effort vise un but précis : l’augmentation de la musculature, le sens de s’assouplir, de s’accroître en vigueur. Pour nos rameurs de la Seine, le désir est de parader en maillot de couleur et de goûter la fraîcheur de l’eau, l’arrangement du paysage, le jeu des lumières sur les rives. Nous sommes en quête de sensations, tandis que le bourgeois de Londres est en quête de forces. Nous meublons notre esprit. Il nourrit d’abord sa santé. Nous exerçons notre sensibilité. Il exerce sa volonté.

Bien entendu, cela ne signifie pas que le Latin néglige