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appréhension secrète. Elle baissa les yeux. Elle s’occupa de chasser quelques poussières illusoires le long de sa robe. La tante Aurélie regardait soigneusement les muses de stuc assises, une lyre à la main, dans la voussure du plafond. Une sorte de nuage noya son œil tendre. Alors le silence de chacun exprima des sentiments tragiques devinés par tous. Denise ramenait, en les frottant, le rose à ses joues. Elle appela le petit chien, pour dissimuler, et se plaignit de la température. ― le souvenir de Bernard, dit sourdement Aurélie, nous a toujours rendu pénibles les départs des nôtres pour la guerre… j’aime à penser que ce souvenir, Denise, ne te quitte pas non plus. Sa nièce ne répondit rien. Elle étancha deux larmes, sans épargner ses caresses à la bestiole, qui s’arrangea pour dormir sur les genoux et grogna. Nerveuse, Aurélie serrait en pelote les dentelles de son mouchoir. Maman Virginie, ayant croisé les doigts, murmurait une prière. Apparemment, le général flaira le péril qu’il y avait à découvrir, dès cette minute, son dessein. Le temps qui s’obscurcit, une lointaine détonation, le sifflement d’une chaude bise qui retroussa les feuilles du platane dans la cour, lui permirent de craindre à haute voix l’orage, puis de le souhaiter, changeant de propos. ― j’aime l’orage ! ― affirma Denise. ― la puissance de Dieu nous apparaît mieux alors, et d’une façon toute sensible, ― déclara Virginie sous un signe de croix. ― oh ! Moi, reprit l’enfant, ― je suis comme lord Byron. J’aime la tempête, la foudre et l’éclair. Ah, qu’il me plairait de braver les flots en furie sur un esquif, pendant que le feu sillonnerait l’air au-dessus de moi ! ― comment ! Tu lis les ouvrages de cet athée ? ― gémit sa mère. ― non… la