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le déclaraient les enthousiasmes égalitaires des Lyrisse. Ceux-ci rêvaient. Les Praxi-Blassans jugeaient sainement. Omer Héricourt se rendit à ses ambitions d’enfance. Il briguerait la mitre, la pourpre et la tiare ; il accomplirait l’œuvre même de Moïse imposant la Loi divine par les sciences de l’initiation. À quoi bon vouloir la délivrance de cette multitude qui s’ébaudissait à l’heure même où les procureurs royaux réclamaient déjà la peine de mort contre les sergents de La Rochelle, avant de requérir contre le général Berton et l’oncle Edme ? À quoi bon avoir voulu la gloire et la liberté de ces foules stupides, contentes de se promener en sueur, la pipe à la bouche, sous les guirlandes d’herbes et de feuillages garnissant, par-dessus le pont de la Concorde, les fils transversaux des réverbères et leurs potences repeintes ?

Ce peuple ne demandait certainement ni la gloire ni la liberté, mais la poule au pot et le droit d’être vert-galant à la manière de cet Henri IV qu’il chantait :

J’aimons les filles
Et j’aimons le bon vin.
De nos bons drilles
Voilà tout le refrain.


― Vive le roi !

Ainsi criait à tue-tête, aux pêcheurs de la berge, un ouvrier chenu, dodelinant du chef. Les mains aux poches du pantalon fendu sur les chevilles, il gigottait en mesure. Voilà tout ce qui demeurait, en cette cervelle, de la Révolution française faite pour l’affranchir, des guerres républicaines et impériales, de toute une époque héroïque vouée à son avènement. Voilà pour qui et pour quoi le colonel Héricourt était mort dans la lutte contre les monarques, pour qui et pour quoi les Lyrisse, depuis un siècle, couraient le monde, fondant les temples de fraternité et d’égalité, évitant à