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l’homme à la queue de perruque où voltige un papillon obstiné, l’enfant posséderait la gloire même de l’oncle Augustin. Malvina garderait toujours dans ses luxes, au milieu des succulences, le triomphateur.

Aussi ne permet-il pas à Céline de quitter la foule des badauds réunie devant la parade. Que la grosse caisse tonne, que le singe tire la corde de la cloche, que Paillasse souffle dans le trombone, que le discours de Bobêche penché à la barre de l’estrade invite à entrer la Picarde elle-même rougissante et gênée, Omer persiste à vouloir demeurer là. Il verra tout à l’heure se rejouer les péripéties de son espoir. Chaque soufflet claquant la joue fardée du pître, il l’aura presque allongé lui-même. Chaque coup de pied arrivant parmi les basques du ridicule habit à ramages, il l’aura presque lui-même envoyé. Cela l’extasie qu’aucune riposte n’atteigne jamais l’agresseur. Voilà ce qu’il faut, et non point mourir, ainsi que le père, comparable, en somme, à ce Bobêche imbécile toujours écorniflé, giflé, secoué. L’oncle Augustin ne se laisse pas tuer, lui, ni l’Empereur !

Il raisonnait de même quand, faubourg Saint-Honoré la tante Aurélie le complimentait de sa ressemblance avec le colonel Héricourt. Très fier malgré cela, l’enfant se laissait conduire par la main jusqu’au médaillon qui figurait un colonel Héricourt embrouillé dans ses mèches brunes, entre deux épaulettes d’argent.

Ces épaulettes ! Il se souvenait de les avoir aperçues une fois, bien auparavant, désignées par Maman Virginie lors d’une revue, au Carrousel. Parmi tant de soldats, Omer avait mal reconnu le dragon qu’elle indiquait du bout de l’ombrelle à franges bleues. Quel que fût le souhait de son respect filial, Omer se représentait mieux les poitrines en or des maréchaux, les aigrettes des mameluks, les oursons des grenadiers à cheval. Il