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de scènes pareilles à M. Ary Scheffer, le peintre, dont j’ai fait la connaissance, lors de mon retour de Gênes, en mai, à Paris, chez M. Buchez, étudiant, rue Copeau. Le jeune artiste m’avait alors demandé quelques renseignements pittoresques touchant l’Italie, ainsi qu’à mon ami Bazar, en compagnie duquel j’avais accompli mon premier voyage à Naples ; et aussi à MM. Dugied et Joubert, qui en sont revenus, ce printemps, avant moi, puisqu’ils ne poussèrent point jusqu’à Novare. D’ailleurs, tu as dû voir ces messieurs chez Corinne, un dimanche : ils apportaient des nouvelles de Paris à la Goguette, pour ce pauvre lieutenant Boredain, qui est toujours en prison. Bref, en buvant de la bière, du punch, avec M. Ary Scheffer, nous lui avions tracé un tableau des Deux-Siciles assez exact pour nous contenter tous ; et je crois bien qu’il sortira de notre cénacle de la rue Copeau, transféré maintenant ailleurs, quelque chose d’assez propre à étonner le monde, peinture ou action. M. Ary Scheffer nous amena, certain jour, M. De Lafayette, et j’ai pu causer de la Révolution avec le héros de l’indépendance américaine, avec l’ami de Washington et de Franklin.

« Au moment où je voulais me rendre en Artois pour te dire bonjour, les Amis de la Vérité me prièrent d’aller m’établir à Saumur, avec M. Riobé, un de nos amis : nous dûmes aller nous entendre avec mes chevaliers de la Légion d’honneur, en Maine-et-Loire. Voilà comment j’emmenai Graziella sur les bords de la Loire, et la laissai dans une maisonnette tapissée de vigne. De braves dames saumuroises la soignent pendant ma navigation à travers les flots que fendirent les proues des birèmes portant Ulysse.

« Ce verbiage est pour t’annoncer, mon cher conscrit, l’expédition d’un tonneau : il recèle, dans l’étoupe, deux chibouks, un narguilé de cuivre, trois cimeterres et six kandjars, deux fusils albanais, la veste d’une oda-