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chands ; et ce fut une puissante raison de s’affilier à la maçonnerie. On s’étonna de leur nombre au convent des Gaules, en 1778. On compta trois millions de frères représentés au convent de Wilhelmsbad, en 1782. Le duc de Brunswick assembla leurs délégations pour rechercher le vrai but de la maçonnerie. Parbleu ! Il l’ignorait, ce but. Les chevaliers d’Écosse n’avaient eu garde de le lui apprendre. On l’avait amusé avec des apparats et le récit des traditions ; on l’avait persuadé de révérer quelques philosophies ; on l’avait séduit par d’étranges mascarades : le docteur Mesmer, l’ayant fait asseoir devant son baquet, avait endormi des somnambules qui touchaient alors, sans brûlure, des charbons ardents. Malgré les titres de ses grades, le duc n’en savait guère plus qu’un herboriste revêtu des insignes de la maîtrise. Il se méfia cependant, et tâcha de tirer au clair ; mais les apprentis et les maîtres du rite symbolique n’étaient pas moins ignorants. Afin de complaire aux courtisans, ils répondirent qu’ils n’étaient pas les successeurs des Templiers, qu’ils rédigeaient un nouveau code universel… Or c’était celui que les jacobins Cambacérès et Muraire purent ensuite appliquer : celui qu’on nomme, en définitive, le code Napoléon.

« Dès mon retour dans Paris, j’entendis le comte de Lirieux dire à Cazotte, en plein café de la Régence : « Il se trame une conspiration si bien ourdie et si profonde qu’il sera difficile à la religion et aux gouvernements de ne pas succomber !… » J’ai entendu cela, petit ; et j’ai entendu Cazotte insulter la Révolution huit ans d’avance… Ah ! mon garçon, ce fut la période la plus ardente de ma vie. J’étais philalèthe, puis philadelphe à Narbonne, puis je courais les Hollandes à cheval, derrière un ecclésiastique luthérien en grosse perruque batave et qui avait la confiance de monseigneur le prince Ferdinand De Brunswick. Jamais je ne connus d’homme si habile pour obtenir de l’argent : par ses tours