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Toute cette ville en émoi pieux respirait la crainte de souffrir parmi les damnés en ocre dont les bras suppliants émergeaient hors de cet incendie bariolé de sang et de pus.

« Miserere ! » crièrent les religieuses et les moines. Un silence dura pendant lequel le pas unanime s’amortit dans les roseaux foulés. « Miserere ! » gémit encore la dévotion du peuple ; et les grisettes elles-mêmes effondrées à genoux derrière la haie des soldats n’osèrent voir l’effroyable tableau des tortures infernales. Leurs nuques étroites s’inclinaient dans les fichus à ramages. La bannière au calice couronné d’épines s’arrêtait devant le reposoir, terme de la procession, sur cette face de la cité. Là, contre le mur de la dernière maison, une sorte d’estrade avait été construite. Les fillettes à frisure y admiraient des tapis. Rosaces multicolores et palmes écarlates ; fonds blancs à corbeilles fleuries ; Diane de laine rose poursuivant un cerf de laine marron ; cigogne jouant au renard le tour de lui offrir le vase à long col, recouvraient les marches, jonchées aussi de reines-marguerites et de feuillage. Blancheur de nappes et de guipures, l’autel s’élevait dans une floraison de roses d’or sur tiges de laiton plantées en des vases d’albâtre et de faïence à devises, entre des candélabres de bronze vert, des quinquets sur colonnes, et des chandeliers de cuivre. En outre, un éléphant de porcelaine hindoue, qui supportait une tour, dominait tout, du haut d’une boîte en laque présentant les reliefs de poissons sinueux au fond des eaux. Un couvre-pied de velours vert formait le fond de l’estrade, ainsi qu’un tableau représentant saint Louis de Gonzague à genoux et frappé au cœur par un rayon céleste.

Là vinrent aboutir les magnificences du cortège.

L’évêque en or, monta, l’ostensoir aux mains, sur les rosaces, la Diane, le cerf, la cigogne et le renard des