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moins de présents. Denise serait moins fière à son égard ; et lui donnerait moins de claques, s’il froissait, en jouant le linon de leurs tabliers.

― Dis, veux-tu bien être mon fils à moi ? répétait la belle parente.

― Mais oui, répondit-il. Tante Aurélie est l’autre maman de ma sœur Denise… Denise a deux mamans ! J’en aurai deux aussi !

Il fut glorieux d’acquérir une seconde mère vêtue de velours orange.

Cette magnifique tante Malvina lui devint un sujet d’orgueil. Seulement alors il sut avoir souffert de la préférence marquée par les Praxi-Blassans envers Denise. Tout un jour, il s’étonna d’avoir mal conçu les causes de sa tristesse, lorsqu’on emmenait sa sœur à l’hôtel du faubourg saint-Honoré. À son tour, il se prévalait d’une double affection, d’autant plus sensible que maman Virginie, drapée dans ses crêpes, le câlinait à peine, inattentive, fâchée sans doute à jamais. Elle pleurait jusqu’à l’émouvoir au milieu de combinaisons mécaniques pour dévisser la roue d’un chariot, ou réintroduire dans l’épaule le bras amputé d’Arlequin. Enclore de ses petits bras le cou de sa mère, lui mettre de gros baisers aux joues rougies, râpeuses, cela ne pouvait-il réussir à la consoler enfin du crime inconnu ?

Au moins tante Malvina s’égayait de lui. Elle augmenta les perceptions de l’enfant par ses cadeaux. Elle l’emmena même à la promenade.

Tandis que, dans la berline de tante Aurélie, les cousins et Denise ne paradaient qu’avec un chasseur derrière et un cocher devant, Omer, dans la calèche de Malvina, se vit traîné par la manœuvre d’un svelte jockey, couvert d’un gland d’or vif et montant l’une des postières blanches ; puis, à la descente, c’était l’empressement de deux laquais marrons sautés du