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d’un palais où je me cache de la police autrichienne qui en veut à ma tête. " fichtre ! La tête d’un vieux dragon de l’empereur, ça ne s’attrape point comme une boule au jeu du mail ! J’aperçois, de mon trou, une bonne petite goélette qui tangue sur la mer verte du golfe et que j’espère rejoindre, en quelques brassées, dans le milieu de la nuit. Mais, comme je puis manquer mon évasion, je couche ces mots au long de ce papier à chandelles pour qu’au cas de malchance tu te souviennes plus tard d’un oncle qui t’aime bien, et qui pense à toi, aux heures où il paraît sage de convenir qu’on est, après tout, mortel. " n’aie pas peur : ceci n’est pas un testament. Toutefois je confie à une franche amie napolitaine, qui me dorlote depuis quelque temps, ma croix ; c’est celle de ton père, tu le sais, détachée de l’uniforme quand le cœur eut cessé de battre, à Presbourg. Donc, elle t’appartient. Si tu apprends des choses en noir, fais-la réclamer avec la tabatière où je garde le sable de Sainte-Hélène et avec quelques autres babioles, paperasses et souvenirs que je cachèterai tout à l’heure dans un paquet à ton nom. Adresse ta réclamation à la signora Graziella Monero, via di trastevere ; procida, presso Napoli. " maintenant, bien qu’il m’en coûte, je veux te dire ceci. Graziella Monero peut devenir mère avant décembre. Son enfant est le mien. Mon aïeul et mon père se chargeront de la tutelle. Je leur écris afin de les en prier. Mais ils sont vieux : c’est à toi, jeune homme, que je demande de veiller, plus tard, si je disparais demain, sur l’enfant. Je n’ai pas d’autre ami que toi. J’ai perdu ce pauvre G… dans la bagarre du 8. Je pense qu’il a été pris par les gardes du corps de ce misérable Savoie-Carignan qui nous a trahis le 22 mars en passant soudain à la sainte-alliance. Le mieux qui