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rement renoncé, on ne tente plus le sort. Nous serons véritablement un seul cœur, un même geste… Le voulez-vous ?… Avez-vous confiance, une confiance absolue, absolue, en moi ?…

Omer Héricourt tressaillit de joie. Que n’atteindrait-il pas, guidé de la sorte ? Il s’éblouissait à croire.

― Absolue… une confiance absolue… Oh ! oui, mon père !…

Il cria presque la réponse. Alors ses lèvres voulurent baiser les mains du maître, et se figèrent au treillis. D’instinct, toute sa chair en gratitude allait à la parole.

― Vous avez raison, car je vous aime très fortement ! ― dit la voix qui frémissait d’émotion. ― Vous serez la Face. Je serai l’Esprit.

Quelques minutes, ils ne parlèrent plus, suffoqués…

« La tiare ! la tiare !… un jour ! sur ma tête !… » prévoyait la folie d’Omer. La sécheresse de sa langue devint douloureuse.

― Mon fils, achevez votre confession.

L’adolescent n’y songeait guère. Tout en poursuivant l’illusion de son apothéose future, il déclara ses péchés de gourmandise et de paresse. Alors s’évoqua l’image de la servante : il restait à dire la faiblesse. Maintenant, Omer ne redoutait plus d’avouer à l’ami. Toute sa confiance était joyeuse.

― Mon père, j’ai péché par luxure aussi…

― Ah !… Comment ?… Seul ?

― Avec une servante.

― Avec une femme !… Continuez…

Il ne s’étonna qu’un instant de voir les mains s’abattre vers le treillage, et s’y crisper : les bras du prêtre devaient être las de la même posture qu’il gardait, immobile, depuis le début de cette longue confession. Simplement, Omer conta l’aventure. Un soir, dans sa chambre, la servante lui avait porté de la tisane. Tout en bavardant, elle se dégrafait d’un geste machinal,