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parut injuste. D’autre part, sa vanité se flatta d’avoir un secret grave, que partageait un homme, un jésuite, un savant, un ami ; un grand ami s’offrait à sa faiblesse. L’accepterait-il ? le repousserait-il ? Toute sa vie, il le sentait bien, dépendait de cette unique détermination. Il redoutait cette influence maîtresse ; et il la souhaitait à la fois. Influence d’autant plus redoutable que la confession ne laisserait rien dissimuler. Quels desseins le Père Anselme pouvait-il nourrir ? L’attitude, les gestes exprimaient des promesses obscures mais tentantes. À se les exactement rappeler, les paroles étaient d’un professeur scrupuleux ; rien de plus. Pourquoi réclamer, alors, le privilège du confesseur, avec cette voix sourde et cette espèce de fureur ? S’introduire dans l’intimité du Père Anselme, par les moyens du sacrement de pénitence, gênait beaucoup Omer. Durant les congés de la Pentecôte, il avait imprudemment joué avec une servante des Moulins Héricourt. Blonde, blanche, et de joues riantes, elle l’avait couvert de caresses d’abord fraternelles, puis énervantes. C’était la première faiblesse de l’adolescent. Il la fallait avouer, parmi beaucoup de pensées et de lectures contraire à la pudeur. Se faire connaître sous cette lumière défavorable était pénible. L’amitié du Père Anselme l’inclinerait sans doute à l’indulgence. La rude pénitence et les reproches infligés par un prêtre indifférent eussent peut-être moins affligé le coupable que le mépris possible du Père.

Omer expliqua ses transes à son cousin Édouard sans lui révéler les causes très particulières de sa crainte, dans le récit. Il limita la semonce adressée par le professeur d’histoire au blâme de quelques inexactitudes touchant le rôle des Templiers en Terre sainte, inexactitudes qui pourraient lui faire perdre le prix. Il prétendit vouloir changer de confesseur à cause de l’énormité de sa faute charnelle, qui étonnerait trop le