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rentes produites par un domaine affermé dans le pays de Galles. Le major et l’oncle Edme Lyrisse, mis à la demi-solde, voyageaient alors sur l’Océan, du côté de Sainte-Hélène. Ils essayèrent d’enlever Napoléon, à Hudson-Lowe. Cette longue absence fit demeurer la petite fille et sa mère près de deux ans chez la tante Cavrois ; elles lui payaient pension.

La bonne humeur d’Elvire et sa gentillesse malicieuse conquirent doucement l’intérêt du jeune garçon. Elle le préférait aux cousins, au grand Émile trop sévère, et qui préparait ses examens de Saint-Cyr, à Édouard trop turbulent qui la renversait parfois et se moquait d’elle, au gros Dieudonné Cavrois qui la méprisait brutalement, et lui volait des friandises. Pensant hériter d’un devoir, Omer consolait et protégeait la fille du major qui avait servi dans le régiment du colonel Héricourt.

L’oncle Edme ne reparut que pendant les vacances du troisième été. Des soleils lointains l’avaient bruni. La peau s’était séchée contre les os de sa rude figure vivante. Il maniait une tabatière d’or niellé dont les arabesques, insignifiantes à première vue, dissimulaient le dessin d’un aigle. Il le fit remarquer à l’attention des collégiens, ouvrit la boîte ; elle contenait du sable grisâtre…

― C’est la terre de Sainte-Hélène ? dit-il religieusement.

Et il ne permit pas d’en prendre. Il revenait de l’Île, avait vu de loin la maison de l’empereur, sans pouvoir approcher. Les enfants comprirent mal son émotion. Il s’en indigna, pesta contre ceux qui ôtaient l’envie de la gloire aux jeunes Français ; il frappa du poing les vieux meubles recouverts de leurs housses à fleurs. Omer écouta seulement le récit de la chasse donnée par une frégate anglaise au trois-mâts du capitaine, qui narrait en s’aidant de gestes énergiques. Les cousins Praxi-Blassans, d’abord s’enthousiasmèrent pour l’aven-