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Cependant la cloche sonna, dans la chapelle, pour l’office du mois de Marie, et les dragons durent partir. Cœurs gros, les enfants virent disparaître les habits verts, les épaulettes d’argent, les plumets rouges. Ils écoutèrent tinter les éperons et les sabres. Ensuite, ils goûtèrent aux bonbons apportés par le visiteur. Quand ils proclamèrent, dans la cour, la fuite du roi, les jésuites assurèrent que les officiers avaient prétendu faire une plaisanterie très drôle. De Gand, le Roi dirigeait la guerre, tout simplement.


Il gouvernait sans conteste au palais des Tuileries, dès les vacances, malgré que les troupes françaises eussent été vaincues à Waterloo. Ce fut seulement de la tante Caroline, aux Moulins Héricourt, que les collégiens apprirent toute la vérité des Cent Jours, l’exil de Napoléon.

La tante Caroline reçut alors Mme  Gresloup qui ramenait de Bruxelles, dans une berline, au pas, son mari blessé, enfin transportable. L’étrangère était une grande dame élégante et mince, habillée à l’anglaise de robes plates et de petits chapeaux pareils à celui de la duchesse d’Angoulême, lors de l’entrée du roi. Pour l’épouser veuve, le major Gresloup avait soudain quitté, en 1810, les escadrons. Née dans un chou de leur jardin à Paris, rue Saint-Florentin, leur fille était un bébé rieur et chancelant qui pleura beaucoup lorsqu’elle sut le mal de son père.

― C’est un jacobin, un philadelphe, un fou… le pauvre homme ! Grommelait Caroline étalant des draps propres sur le lit de la chambre qu’elle lui préparait avec le secours d’une vieille servante familière. Cavrois, savez-vous bien, Brigitte, mon pauvre Cavrois a dû le sauver déjà quand le général Mallet s’est laissé prendre et fusiller à Grenelle. Un tantinet de plus, et le major faisait nombre dans le peloton des con-