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raient de la crainte. Jésus lui-même lave leurs pieds. Comme les portraits des magiciens et de Moïse, la plupart se paraient de barbes épaisses. Peut-être, encore qu’ils fussent pauvres, auraient-ils pu dominer tout.

L’oncle Augustin, l’oncle Edme, le colonel Pithouet, grand-père Lyrisse, tous les officiers, il les comptait pour inférieurs au prêtre, le confident de Dieu, ce gros homme bedonnant, ami de la belle tante, et qui montait du village au château, le dimanche, après vêpres, en redingote marron. Mais Omer l’avait aperçu vêtu d’or pendant la messe, et debout devant la foule agenouillée, silencieuse, confondue. Envers celui-là, maman Virginie abdiquait son pouvoir. Et les évêques, à la Fête-Dieu, sous un dais de brocart ! Les cloches tintent par toute la ville. Les rues se jonchent d’herbes. Les filles en blanc suivent, avec des voix angéliques… Voilà les puissants ; ceux qui ne vont pas mourir dans les boues lointaines. À leur passage l’humanité se prosterne. De peur de déplaire à un maître si fort, Omer, dès le salut au prêtre, s’enfuyait du salon.

Au même rang social, il plaça les tantes Aurélie et Malvina. Des hommages presque pareils les accueillaient. En outre, elles étaient belles. Leurs équipages valaient, certes, le dais de la procession, et leurs salons l’intérieur des chapelles. Leurs maris comptaient pour rien.

En son rêve d’avenir, il se voulait sous la dalmatique épiscopale, dans la calèche de tante Malvina, les cavaliers saluant, le peuple adorant, les soldats présentant les armes.

Au-dessus des tantes et des princes de l’Église, peut-être existait-il un empereur au nom de qui sonnaient les fanfares, les orgues, au nom de qui battaient les tambours. Peut-être.

Semblable à un prêtre en petite tenue, le bisaïeul parlait aussi de religion, pouvait beaucoup.

Omer essayait de comprendre ce que maman Virginie