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IRÈNE ET LES EUNUQUES

naires. Oublieux d’Irène, il se leva, se précipita sur les documents, et les lut avec colère. Il fit un geste impératif. Le sourd-muet écarta les tentures de cuir rouge, et les scribes rentrèrent. Irène espéra qu’on la congédiait. Elle s’inclina profondément, les mains sur le cœur qui frémissait de courroux. Distrait, son beau-père traça vers elle le signe de la bénédiction impériale. Pourtant elle dut se retirer à reculons, et se prosterner à demi quand elle eut atteint les portières. Ses dents se serraient. Ses ongles entraient dans ses paumes. Le cortège de ses eunuques et de ses femmes l’étonna comme si elle ne se souvenait plus qu’elle était la bru de l’Autocrator.

— Longue vie à la Très Puissante Irène basilissa des Romains !… prononçaient dans les galeries, en se courbant, ceux qu’elle rencontrait, fonctionnaires aux insignes magnifiques, officiers aux armes tumultueuses, évêques mitrés d’or, patrices en manteaux d’apparat, et qui voilaient les insolences de leurs œillades curieuses sous des cils prompts, sournois.

Dans les coupoles, les griffons des mosaïques semblèrent féroces. Des cours pleines de bavards, une odeur d’encens, de friture et de cuir humide montait jusqu’aux galeries hautes, jusqu’aux colonnades de jaspe, jusqu’à leurs chapiteaux qui étaient des lions écrasés par les arcs trilobés des cintres. Irène marcha vite, le front haut, et dissimulant sa fureur derrière une mine de fierté.

Ainsi, l’intelligence qui l’avait soudain fait élire, entre