a formé un petit paquet bien régulier, elle en commence la lecture :
Le très aimable — Monsieur le Grand Doyen — a rencontré — La sémillante — Jeanne Davernis — au marché aux poissons. — Il lui a dit : — « J’aime le ciel quand il est pur. » — Elle lui a répondu : — « J’aime mieux les épinards. » — Il en est résulté — un feu d’artifice. — Le monde a dit : — « Ce sont deux enfants. »
Des oh ! et des ah ! de satisfaction témoignent à Arlette du succès de son jeu. Telcide fait bien quelques réserves sur l’inconvenance de mêler M. le Grand Doyen à ces fantaisies. Mais Arlette lui réplique :
— Il me semble, ma cousine, reconnaître votre écriture. N’est-ce pas vous, qui avez inscrit le nom de M. le Grand Doyen ?
— C’est possible. Mais je ne savais pas alors que vous le feriez aller au marché aux poissons…
— Peu importe, conclut Mlle Caroline. Voyons les autres billets…
Arlette lit :
Le respectable — Monsieur Ulysse Hyacinthe — a rencontré la froufroutante — Mademoiselle Clémentine Chotard — à l’École de natation. — Il lui a dit : — « Voulez-vous accepter un bonbon ? » — Elle lui a répondu : — « Non merci, je ne fume pas. » — Il en est résulté — un accident de chemin de fer. — Le monde a dit : « C’est bien fait. »
Les exclamations de joie se renouvellent bien entendu. Mais elles se prolongent moins que pour le premier billet. Le nom de M. Ulysse Hyacinthe a provoqué une vive surprise. C’est Arlette, qui malignement l’a jeté dans le jeu. Mais on s’imagine aussitôt que c’est M11e Caroline Lerouge, car celle-ci annonce :
— À propos… Vous connaissez la nouvelle ?… M. Ulysse Hyacinthe, le professeur du collège, qui est parti depuis dix ans, revient parmi nous…
— Ah ! dit Telcide, intéressée.
— Vraiment ? murmure Rosalie.
— Tiens ! tiens ! répète Jeanne sur un ton équivoque.