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CES DAMES AUX CHAPEAUX VERTS

un de ces petits paillassons et agenouillez-vous…

Les quatre sœurs sont déjà installées. Ernestine est venue se joindre à elles. On sent qu’elles ont chacune leur place fixée.

La prière dure plus de dix minutes. Les demoiselles Davernis sont les clientes de saints différents. À tour de rôle, elles s’imposent de répondre à leurs oraisons réciproques. Après quoi elles déroulent une suite interminable de litanies :

— Vous devez désirer faire une invocation particulière, dit Telcide à Arlette. Faites-la… Nous la ferons avec vous.

Sans qu’un muscle de son visage ne trahisse l’ironie de sa pensée, Arlette répond :

— Notre-Dame de la Délivrance, priez pour moi…

Les quatre demoiselles et leur bonne aussitôt de répéter :

— Notre-Dame de la Délivrance, priez pour elle…

C’est la fin. On se lève. On range exactement les chaises le long du mur. Il ne doit subsister aucun désordre dans la salle à manger.

Ernestine apporte la tasse de camomille. Sous l’œil observateur des quatre sœurs, Arlette absorbe cette eau chaude :

— Cette tisane est exquise, dit-elle.

Sur la table sont maintenant disposés cinq chandeliers de cuivre, avec de hautes bougies, dont les flammes vacillent. Marie doit à sa jeunesse relative le privilège d’éteindre la lampe.

— Nous n’oublions rien ? demande Telcide.

— Non.

— Eh bien ! montons…

Telcide, Rosalie, Jeanne et Marie, comme si elles exécutaient la figure d’un quadrille, se donnent l’accolade en susurrant : « Que Dieu vous ait dans sa sainte garde, ma bonne sœur ! »

Arlette est conviée à entrer dans la mêlée.

En cortège, par rang d’âge, elles gravissent alors l’escalier lentement ; on croirait une retraite aux flambeaux, dans un opéra sans gaieté.

À la porte de la chambre d’Arlette, le groupe s’arrête. Telcide prend la parole :