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CES DAMES AUX CHAPEAUX VERTS

— Assieds-toi, murmure Jean, tu vas savoir ce que m’a dit le notaire.

Pour s’installer côte à côte sur le canapé, ils chassent Bob et Peggy, qui ne comprennent pas les raisons de ce manque d’égards et vont, en grognant, se réfugier sous un meuble :

— Voilà ! commence Jean. Me Clapeau a été très convenable. Je me méfiais un peu de lui. Je craignais qu’il s’autorisât de ce qu’il était vieil ami de la famille pour se mêler de choses indiscrètes. Il a eu pour moi tous les égards possibles.

— C’était bien le moins !

— Par exemple, il a été plutôt dur pour papa. Tout en me répétant qu’il ne prétendait pas le juger, il m’a dressé contre lui le réquisitoire le plus sévère. Il paraît que son imprévoyance et sa négligence ont été inouïes. Ses besoins augmentaient chaque année. Le tourbillon de Paris l’avait saisi. Insensiblement, il s’est lancé dans des affaires de plus en plus hasardeuses, jusqu’au jour où…

— Tout a craqué…

— Oui…

— Cette catastrophe aurait rendu folle notre pauvre maman, si nous ne l’avions perdue, il y a cinq ans.

— Me Clapeau va donc, maintenant, faire vendre notre hôtel avec le mobilier. Si cela ne suffit pas pour liquider le passif, il prendra des engagements avec les créanciers. De cette façon, notre honneur sera sauf…

— Et nous, qu’est-ce que nous deviendrons ?

— Me Clapeau l’a trouvé.

— Ah ! bah !

— Oui… Moi, il m’envoie aux colonies. Il a obtenu d’un de ses amis, directeur d’une puissante société commerciale, qu’il me prenne, comme sous-chef d’abord, comme chef ensuite d’un de ses comptoirs au Soudan. Je serai très raisonnablement payé. Avec de l’initiative et du courage, on estime que je peux gagner une petite fortune…

— Tu acceptes donc de partir ?

— Dame ! je n’ai pas le choix… Quand un homme a été élevé comme je l’ai été, il ne peut pas s’abaisser à prendre une place inférieure dans une administra-