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CES DAMES AUX CHAPEAUX VERTS

à l’esprit… Je cherche pourquoi l’agent de police, à la porte, m’a crié : « Dépêchez-vous, c’est bientôt votre tour… »

— Tenez… asseyez-vous là…

Sans que Marie Davernis se soit aperçu de son arrivée, tant elle bavarde avec Caroline Lerouge, Ulysse Hyacinthe se trouve près d’elle. Dans sa hâte, il s’est assis de côté. Il est si ému qu’il n’ose s’installer confortablement. Il gardera longtemps sa pose en biais, bien qu’il soit sensible à l’ankylose et au torticolis. Il a sa valise sur les genoux et il attend…

Qu’attend-il ? Il serait bien en peine de le dire… mais il attend…

Arlette peut faire : « Ouf ! et contempler son œuvre. Elle a atteint le résultat voulu. Normalement les événements doivent maintenant se dérouler d’eux-mêmes. Dans l’ordre, elle voit sur son rang : Telcide, Rosalie, Jeanne, Marie, Ulysse Hyacinthe. Admirable tableau ! Ayant Jacques de Fleurville à sa droite, elle a le professeur à sa gauche…

Et ce dernier attend toujours ! Marie continue de potiner. Soudain, il n’y tient plus. Comme une bouffée de chaleur, l’amour passé lui remonte au cerveau. Il approche son bon mufle de l’oreille de sa voisine et il lui murmure de sa belle voix de contre-basse :

— Me voici, merci !

La pauvre fille, émue d’avoir senti ce souffle chaud, se retourne si vivement qu’elle heurte de son chignon le nez du professeur et fait sauter ses binocles. Elle voulait lui demander la raison de ce « me voici, merci ! ». Mais aucune catastrophe pire ne pouvait s’abattre sur le malheureux. Sans ses binocles, il est aveugle. Aussi se précipite-t-il à genoux dans le désordre de ses gants, de son chapeau, de sa valise, et essaie-t-il à tâtons de retrouver les verres sans lesquels il n’est plus pour lui de lumière, de Marie et d’amour…

— Je les ai enfin…

Fausse alerte ! il ne ramasse qu’un rond en caoutchouc détaché d’un talon. Il faut qu’Arlette l’aide et lui rende la vue.

Il était temps !