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CES DAMES AUX CHAPEAUX VERTS

jeune homme ? est-ce son évocation de Paris ? Elle ne discerne rien sauf qu’elle est troublée et que son trouble est exquis. Loin de le secouer, elle s’y abandonne.

Ne songeant plus à sonner à d’autres portes, elle marche droit devant elle. Il y a là un jardin public autour des ruines d’une ancienne abbaye. Elle s’y assied un instant. Des enfants, en jouant, se poursuivent et se chamaillent.

Elle se répète en elle-même tout ce que Jacques lui a dit. Et elle pense :

— Il est très gentil, ce jeune homme… Nullement snob, il m’a paru intelligent… Viendra-t-il dans six semaines à ma grande représentation ? Mystère… Il m’a semblé que je ne lui étais pas indifférente… Est-ce que par hasard je ne serais pas aussi loin de Paris que je me l’imaginais ?… Ce serait la réalisation d’un joli songe !… En travaillant pour les pauvres, j’aurais travaillé pour moi-même et la tombola m’aurait valu le gros lot : mon bonheur !…

L’imagination a vite fait de réaliser des prodiges ! Lorsqu’elle rentre chez elle, Arlette ne pense plus du tout au roman de Marie. Elle en a entrevu un autre.

— Eh bien ? mon enfant, lui demande Telcide… Avez-vous réussi dans vos premières démarches ?…

— Oui, ma cousine… au delà de toutes mes espérances.

M. de Fleurville vous a reçue ?

— Non, mais j’ai vu son fils, qui m’a donné deux cents francs… Il a été fort aimable…

— C’est étonnant !… Vous a-t-il annoncé qu’il va épouser une jeune fille noble, très riche, Mlle de Poulbacques ?… Il paraît que ses fiançailles sont officielles…

— Il ne m’en a rien dit…

Arlette a brusquement l’envie de jeter par la fenêtre les billets de sa grande tombola…