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pas, serait centenaire. Je frappai à sa porte : elle ouvrit prudemment, et tout d’abord elle refusa de me recevoir. Les rides creusaient son visage et ses cheveux blancs pendaient hors de son bonnet sur ses joues. Elle était petite, menue, toute resserrée par l’âge. Mais quelle finesse de traits ! cette finesse à quoi l’on reconnaît, malgré la longue vieillesse, le charme indestructible d’une femme française, qui a été jeune et jolie. Que lui voulais-je ? Des souvenirs ? elle n’en avait pas, ou du moins ils appartenaient à ses morts. Néanmoins, entendant bien que j’étais de l’autre côté des Vosges, elle me laissa entrer. Je pénétrai, derrière elle, dans un salon étroit aux volets fermés, et qui montrait cette propreté soignée des vieilles demeures d’où l’on ne sort guère. Sur les murs, il n’y avait que des photographies d’officiers, entre autres un portrait de capitaine de hussards, des assiettes qui représentaient des scènes napoléoniennes, et encore un calendrier où chevauchaient des cuirassiers.