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sous terre leur dernier sommeil. Aussi, pendant tout le mois d’août, la ville prisonnière s’est-elle remplie de vétérans chevronnés accourus des plus lointaines provinces de l’Allemagne pour célébrer leur gloire aux mêmes lieux où ils l’ont conquise. On les rencontrait, partout, blanchis, ventrus, la poitrine couverte de leurs rubans et de leurs médailles, envahissant les rues, les tramways, les brasseries, salués par tous les troupiers. La ville pleine de musiques militaires, de rires, de chants était plus triste que jamais, parce qu’en ces jours de fête, pour elle jours de deuil, elle sentait plus cruellement pénétrer dans sa chair meurtrie la serre de l’aigle noir qui la tient captive.

J’avais choisi cette date pour revoir Metz : il n’est pas bon qu’une plaie, telle que celle qu’ont ouverte dans nos cœurs les désastres de 1870, puisse jamais se cicatriser, et il est bon qu’on y porte le fer, pour qu’elle saigne de nouveau. Français obscur, je me mêlais aux groupes de vétérans que les vagons de