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jours sans compter versé leur sang pour la France, et qui servaient, avec les Alsaciens et les Lorrains, de rançon à la France abattue ! Erckmann, de guerre lasse, quittait Phalsbourg et se fixait à Lunéville. Il devait garder jusqu’à la mort l’inguérissable blessure de l’exilé.

Un avenir prochain lui préparait d’autres souffrances. Il avait perdu sa petite patrie ; il allait perdre son ami et son collaborateur, et de la façon la plus cruelle.

Comme Erckmann vivait loin de Paris, Chatrian s’occupait de placer les pièces et de les faire répéter. Jugeant qu’il ne pouvait accomplir ce travail tout seul, il s’était adjoint un collaborateur. Ce collaborateur, il voulait le payer sur les droits d’Erckmann et avait commencé à le rétribuer ainsi. Celui-ci, quand il l’apprit, protesta, disant que, s’il n’avait pas écrit des contes et des romans, jamais Chatrian n’aurait eu des pièces à faire. Le litige fut soumis à un arbitrage qui donna gain de cause à Erckmann et obligea