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éprouve pour elles de la sympathie : à peine a-t-on fait quelques pas, et l’on sait qu’on voudra y rester ou qu’on se hâtera d’en sortir. Il y a, dit La Bruyère, des lieux que l’on admire, il y en a d’autres qui touchent et où l’on aimerait à vivre. Si l’on y reste, chaque journée écoulée procure une joie nouvelle : leur compagnie, comme celle d’un honnête homme ou d’un esprit délicat, est une source de plaisirs, et on finit par les aimer, comme un être vivant, mais plus fidèles que les êtres vivants, elles ne déçoivent jamais. Colmar est une de ces villes-là. J’y ai vécu bien des jours de ma vie, mais chaque fois que j’y retourne, je ressens la même douce émotion. Quand je pense à l’Alsace, c’est d’abord vers le coin de terre ou repose mon père que s’en va ma pensée, puis vers elle, car, heureusement encore à peu près oubliée des modernes architectes allemands, elle présente l’image presque intacte de la ville alsacienne, digne, charmante, glorieuse, toute pleine d’un noble passé, pleine aussi d’art et de poésie.