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JULES RENARD

« Je suis l’homme des petits chefs-d’œuvre, des minuscules, minuscules chefs-d’œuvre, qu’on met dans sa poche, ou qu’on oublie dans les boîtes à poudre de riz… Un Benvenuto Cellini… Mais la foule est bête, elle ne comprend pas. Elle adore les romans de cape et d’épée, et les feuilletons du Petit Journal, ou les œuvres de M. Rameau. Que lui importent des livres d’une impeccable écriture et d’une exacte observation. La foule est bête, la foule est bête… »

Sa voix devint plus forte. Il s’était levé, et les mains enfouies dans les poches de sa robe de chambre, les pieds traînards, il allait d’un mur à l’autre, le front haut, un sourire méprisant sur les lèvres.

Le petit jeune homme était compatissant : il s’attrista de ces mélancoliques désirs et il s’attendait. Ah ! comme il eût voulu connaître M. Renard depuis très longtemps ! Il lui eût tapé sur le dos, amicalement, mais fortement. « Allons, allons, mon vieux ! en voilà une blague, ce que tu racontes ! qu’est-ce qui te prend ? » Mais il ne le connaissait que depuis