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HUMOUR ET HUMORISTES

La marionnette agita les jambes, remua la tête et, dressant un bras :

« Sans doute, reprit-elle, et sans doute aussi c’est très bien ce que tu fais. Tu aimes tout ce qui ne vit pas, et tu devines ce que pensent les choses : les âmes tristes des cure-dents, les âmes orgueilleuses des triangles musicaux, les âmes sanglotantes des billards te révèlent tous leurs secrets, et sur leurs confidences tu brodes d’infinies variations en vers dont la forme s’adapte toujours à leur nature. Soliloques et dialogues, évocations et invocations, apartés et répétitions, tu connais et tu pratiques en virtuose les procédés innombrables du développement… Mais tu devrais cesser ; voilà longtemps que ça dure. Penses-tu découvrir toujours des sujets nouveaux, et ne crains-tu pas de tomber dans la monotonie ? »

La petite marionnette inclina davantage la tête, ses jambes se rapprochèrent, ses bras collèrent à son corps, et, semblable à quelque loque pendue au bout d’une ficelle, elle demeura immobile. Les flammes l’entouraient en chantant.