En même temps elle lui tendit un flacon d’odeurs, mais il le repoussa, en s’écriant :
— Je vois une âme empoisonnée là-dedans.
— S’il y a une âme là-dedans, c’est sans doute celle de ton père, de ton père si beau ; c’est le flacon que je lui tendis le jour où, devant ma porte, il fut frappé en duel par le lieutenant, le cousin.
— Je vis sous le même toit que l’assassin de mon père, et tu es sa meilleure amie !
— Tu en sais trop, continua-t-elle, pour que je ne t’apprenne pas tout ce que j’ai fait pour toi, toute la reconnaissance que tu me dois. Toute la ville appelait ton père le beau ***. Cette réputation fit que pour lui j’oubliai mes devoirs. Notre amour resta secret, il est vrai ; mais les suites de ma faute me mettaient dans la certitude d’être bannie de la cour, si je ne pouvais les cacher ; car ton père avait été tué avant de remplir la promesse qu’il m’avait faite de m’épouser.
— Je réussis.
— Je le sais.
— Et en même temps que je vengeais ton père de son meurtrier, je te mettais en possession de ce qui aurait dû échoir en tout droit à ce dernier. Je fis plus : par mon influence à la cour, je me mis en travers de toutes ses tentatives d’avancement, je l’enlaçai dans les filets