était un des orateurs populaires les plus aimés. Assez d’esprit pour déposer tout sentiment de bonté, assez peu d’honneur, assez d’insouciance pour ne pas s’effrayer des maux qu’il pouvait causer, sa vie aventureuse lui donnait la facilité d’apprendre et de parler la langue et les sentiments de la populace. Haineux contre la noblesse dont il faisait partie et d’où il était repoussé de tous côtés, il excitait ses auditeurs à l’anéantir ; lorsqu’une fois le chemin est frayé dans une telle direction, lorsque la route est marquée par le sang, les hommes s’y précipitent comme des buveurs qui sentent bien qu’ils ont bu plus qu’il ne le faut, mais qui n’en boivent que davantage, parce qu’ils ne sont pas sobres, et ne désirent pas l’être, en cessant de boire ; et lorsque, même contre ses convictions, on autorise un acte d’injustice, on ne tarde pas à le faire soi-même.
Frenel qui d’abord taisait ses opinions, de peur de passer pour aristocrate, suivit bientôt l’entraînement de cet émissaire républicain dans la province, et prêta son nom aux actes infâmes de Saint-Luc.
Quelques meurtres isolés avaient déjà frappé des familles nobles, mais Saintrée n’en avait rien appris, à cause des nombreux voleurs qui couvraient les routes et interceptaient les communications ; il ne participait