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lui, manquant de décision et d’impulsion. Beaucoup de nobles émigraient, ce qui excitait encore la haine contre ceux qui restaient.

Saintrée n’avait pas de confiance en l’étranger ; pour lui la France, c’était le monde ; et du reste il pensait être à l’abri, lui qui avait distribué presque tout son bien aux pauvres du pays. Mais ce ne sont pas ces pauvres qui fomentent les violentes révolutions ; il y a une classe moyenne, qui, grandissant au delà de ses limites, ne peut atteindre des régions plus élevées qu’en déplaçant violemment les rangs de la fortune et de la noblesse. De petits fermiers aisés, qui avaient fini par se considérer comme propriétaires, et des propriétaires endettés, unis ensemble, et en relation avec les villes, répandaient la discorde et soulevaient les masses. Frenel était arrivé de Paris avec la mission de diriger le mouvement dans le Midi. Mais avant qu’il arrivât à Marseille, les habitants du pays, avec leur nature ardente, avaient déjà appris à se diriger eux-mêmes. On avait décidé à quel parti on se rallierait, et Frenel rencontra quelque opposition.

Saint-Luc qui, depuis que nous l’avons quitté, s’était fait fermer, à cause de ses mauvais coups, et surtout de sa mauvaise foi au jeu, la société des chevaliers de Malte, et par conséquent celle de la noblesse,