Page:Achim von Arnim - Contes bizarres, Lévy frères, 1856.djvu/192

Cette page a été validée par deux contributeurs.

faites : la gravité de l’événement ne retient pas la colère de leur langue ; et leur tête se remplit tellement de leurs impressions, qu’elles ne gardent plus aucune retenue.

Aussi au lieu de s’effrayer de la colère du prince, Braka lui reprocha amèrement d’avoir, par son entêtement à l’unir avec Cornélius, poussé Bella à s’enfuir.

L’archiduc ne répondit rien ; il vit bien qu’elle avait raison, que sa maladroite prudence lui avait fait perdre ce qu’il avait de plus cher, ce qui avait fait le bonheur de sa vie ; il se sentit aussi méprisable aux yeux de cette vieille que le petit l’était à ses propres yeux. Il dit à Braka de se retirer, en la priant d’accepter une pension qu’elle dépenserait à sa cour, afin qu’il eût quelqu’un à côté de lui pour parler de sa Bella. Ses innombrables courriers parcoururent toute l’Allemagne, et ne lui apportèrent pas de nouvelles. Son grand-père Maximilien, qui savait quelque chose de sa passion, avait fait faire des recherches partout.

Enfin, et tandis que Bella était déjà bien loin avec les siens, il apprit qu’elle était accouchée en Bohème d’un prince auquel, en le baptisant, on avait donné le nom de Selrahc (le nom retourné de son père Charles), et que l’écolier enlevé par les bohémiens était de-