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PARTENZA…

mélancolies de l’Orient, tous les embrasements des côtes méditerranéennes ; ces jolis petits cireurs des rues, loqueteux et misérables, dont les voix se font un moment nasillardes et traînantes pour offrir aux passants les menus services de leurs brosses et reprennent ensuite, joyeux comme des violes et des castagnettes, le superbe langage des idiomes barbares.

Ils jouent aux billes, près de la cathédrale, sur le grand parvis délaissé où personne ne vient ; c’est leur dimanche à eux aussi ; et, dédaigneux du sou qui les fait vivre, ils se livrent aux jeux tranquilles des enfants.

Là, devant eux, contre les formidables paquebots endormis, les vagues se heurtent, rageuses et surprises de leur impuissance, et bavent une écume blanche le long des flancs inertes.

Ils sont gigantesques vus de près, ces mondes de ferraille et de charpentes dont la grande mer, au large, ne sent même pas le poids et diminue jusqu’à l’infinitésimale poussière la stature de colosses.

Ils vont frôler les quais de toutes les villes étranges dressées au front des caps, étalées au fond des baies ; ils passent toujours semblables à ce qu’ils sont ici, dans les vents ouatés d’odeurs affolantes, là-bas, à travers les îles océaniennes si lointaines qu’elles semblent d’improbables pays de rêves ; ils glissent sur des mers splendides comme des apothéoses, où s’allument, par des soirs fantastiques, des ciels embrasés de flammes de bengale, sans souffle, lourds de pesants parfums, dans les blêmes phosphorescences