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PARTENZA…

diesse et l’extraordinaire sûreté de ma bête docile qui pose ses sabots aux bons endroits et avance sans hésitation dans des hérissements de laves où j’aurais peine à me tenir. Mon petit guide s’appelle Agostino ; il est de Résina, en bas du Vésuve. Il n’est pas joli comme le galopin de San Vito, mais ses grands yeux étonnés sont très doux et tout à fait noirs ; ses regards ont un je ne sais quoi de tiède, de mélancolique et d’interrogateur ; des cils très longs les voilent par inintervalles espacés, quand ils tombent lentement sur le cercle bistre violet qui cerne et plonge dons l’ombre le tour de ses yeux de petit faune d’une sauvage élégance, habitués à l’âpre contact de ces laves brûlantes et des genêts d’or dont ils ont les reflets. Il excite son petit cheval avec des cris gutturaux qui m’étaient inconnus : hrrâh… hrrââh, et glissent étranges et impressionnants entre ses lèvres rouges, entre ses dents très blanches d’adolescent toujours libre, hâlé magnifiquement sous le clair soleil, assoupli dans l’étreinte incessante du grand air : hrââh… gémit-il encore, hrââh !… comme s’il avait cueilli dans le vent rapide ou dans le grondement sourd du brasier qui râle sous nos pieds le rythme de sa plainte : hrââh…

Nous marchons sur des crêtes de vagues monstrueuses refroidies tout doucement dans leur marche lente. Par endroits, de petits cratères s’enfoncent, cylindriques, dans la terre ; leur ouverture est jaune, pailletée de cristaux de soufre qu’y déposent en s’échappant des vapeurs suffocantes. Des laves ré-