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LUC

lesquels se dissolvent les buées bleues des perspectives lointaines. Les cloches répandent leurs carillons. De jeunes fantômes éblouissants de lumière glissent sur la place de la Trinité, envahissent les perrons de l’église. Passent des charretées de lilas, de violettes, de marguerites et de coucous ; de coucous dont l’or vert dégage les frustes arômes des bois.

Luc descend la rue de Clichy ; il rencontre des fleurs ; ses yeux sont charmés. Les violettes embaument ; les lilas en gerbes raidissent leurs cônes lourds de légères campanules mobiles entre de pâles verdures. Des fleurs, des fleurs et du soleil ; le matin radieux égayé de fleurs neuves sur quoi tombent la chanson des cloches et la poussière d’or du ciel. Les rayons du soleil se brisent sur les frêles mousselines blanches des communiantes et les cernent d’étincelantes auréoles.

Des fleurs, du soleil et des carillons, des carillons et des parfums, des parfums et de l’amour embaument, brûlent et frissonnent au cœur de Lucet. Il veut égaler toutes ces choses, dispenser leur beauté en laquelle il communie parmi toutes ces frêles créatures diaphanes prises dans leurs voiles amoncelés aux portes de l’église… Non, non, ce ne sera pas pour Jeannine seule, ce matin, ce sera pour elles toutes, toutes ensemble ! Pour elles toutes il chantera ; pour eux tous aussi les jeunes garçons dont il était encore hier ! Son cœur bat violemment, il rêve d’en disperser la fièvre autour de lui. Les fleurs en passant disent :

— Vois comme nous sommes jolies, aime-nous.

Le soleil crie :