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LUC

naient si gentiment au talent puéril du petit chanteur demeura pour lui la joie et l’énigme de cette soirée.


Luc Aubry n’allait plus chanter. C’était fini. Sa voix se faisait délicieuse dans une maladresse nouvelle. Des notes graves en abaissaient le registre ; elles étaient comme de frêles bourgeons éclos soudain, dévoilant au pur soleil leur jeune offrande de pousses tendres avides de s’épanouir, pressées de développer des feuillages pour être fleurs bientôt et révéler la saveur de leurs fruits.


La tristesse de Lucet est grande ; grande comme sa joie. C’est la dernière fois qu’il paraît à la maîtrise, pour la Première Communion. Jeannine sera parmi les communiantes. Mme Marcelot a tenu que Jeannine eût douze ans révolus pour accomplir cet acte grandiose et puéril. Et Luc sera ce soir de la fête organisée, rue Saint-Lazare, à cette occasion. Le charme de la jeunesse fera cortège à la royauté juvénile de la jeune fille. Lucet la verra de tout près ; mieux, il chantera pour elle seule. Ce ne sera pas, comme à l’église, pour une foule anonyme, ce sera pour l’enfant que ce printemps va faire jeune fille comme il vient de le faire, lui, jeune homme. Aussi Luc ne veut pas être triste. Il a deviné un peu déjà les joies perverses et compliquée.’de ceux qui savent trop, il va connaître celles, ingénues et simples, de ceux qui tout ignorent.


De grand matin les rues sont désertes. Le soleil paisible dore les maisons de rayons obliques sous