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LUC

jeune homme si exquisement alangui sous les traits de son joli visage ovale terminé par un menton d’une aristocratique élégance avec une bouche menue et d’un frais dédain.-Il avait des yeux conquérants et clairs, une parfaite noblesse dans le front caressé de boucles légères, et toute son expression avouait si franchement le désir, le besoin d’aimer, que l’on entendait comme un friselis de baisers sous le manteau de raide brocart dont ses épaules étaient revêtues.

La camériste entra, annonça Luc :

— Madame prie Monsieur de vouloir bien la rejoindre dans la galerie.

Et la transition fut telle, entre le salon où tous les profils se perdaient insensiblement dans la nuit lente à venir et le hall éclaboussé de lumières, que Luc ébloui perdit la notion du lieu où il se pouvait trouver et crut entrer dans un théâtre. La présence de Déah accentuait cette illusion. Elle était orgueilleusement nue dans un maillot noir ; sa taille effaçait des rondeurs subtiles sous un pourpoint noir aussi éclairé d’un souple réseau de guipure blanche jailli du col ; de ses épaules retombait le deuil d’un lourd manteau de soie ; et les cheveux ondulés de la comédienne complétaient le portrait du salon. Le sourire troublant de Philipp Lord Warton s’avança au devant de Luc ; de fines mains pâles sous les joailleries des doigts s’offrirent à l’étreinte de ses mains. L’enfant les prit, porta l’une à ses lèvres ; et le charme de la comédienne mit dans sa bouche une saveur persistante. Il évoqua rapidement le ravissant externe de Condorcet, lord Warton ; il vit Déah Swindor femme en le bruissement de ses robes, maintenant jeune homme